Adrien Millet, jeune repreneur de la pisciculture de Cerzay, moulin sur la Dive, diversifie au maximum, en acceptant la lenteur au bénéfice du goût. Quatrième étape dans le fumet du bois de hêtre, pour notre série sur le circuit court en Deux-Sèvres.
Noël est déjà là, toquant à la porte du moulin de Cerzay à Assais-les-Jumeaux où l’équipage de la production piscicole se prépare au marché de Saint-Loup qui ouvre traditionnellement la saison, début décembre. Les feuilles d’automne réservent pourtant encore quelques insomnies à Adrien Millet. Lampe frontale fendant la nuit, il ne dort qu’une heure trente quand il s’agit d’honorer plus que son quart de marin, à pêcher les feuilles mortes et racler les grilles pour prémunir la quarantaine de bassins d’un manque d’oxygène.
C’est qu’ici, où les naissances abondent ces temps-ci, rien n’est laissé au hasard pour la truite, reine des lieux. Après son tuilage avec ses prédécesseurs du Moulin de Cerzay, Maryline et Jean-Luc Doucy, qui cédaient leur activité à leur retraite, un méchant hasard a pourtant frappé de plein fouet la toute fraîche ERL Pisciculture de Cerzay créée officiellement par Adrien Millet… trois mois avant le premier confinement de 2020.
Si je vous vends de la merde, je ne vous la vendrais qu’une fois. Je ne ferais pas à manger aux gens ce que je ne pourrais pas manger moi-même
Adrien Millet, ERL Pisciculture de Cerzay, Assais-les-Jumeaux
Le Covid, cela a été le coup d’arrêt net à la fourniture en truites arc-en-ciel et autre fario aux sociétés de pêche, principale source de revenus. Alors, les 40 tonnes de truites produites à l’année - de 250 à 300.000 poissons - ont amorcé un virage, à contre-courant face au temps, pour diversifier davantage la transformation. Le tout en relançant l’élevage et en formant au métier Killian et Tom, les deux apprentis de la MFR de Saint-Loup, embauchés depuis.
On a connu des lancements plus aisés. Mais, aujourd’hui, ambiance scandinave près du séchoir au fumet de hêtre, levée des filets, évidages… le bien-nommé Millet en son moulin du 19e s’est mué en élaborateur de recettes. Des saucisses et des brochettes l’été sur les marchés, des truites fumées, des rillettes, une variante avec de la faisselle de chèvre d’un producteur local : la diversification va crescendo. Bientôt une autre nouveauté, la soupe de truite maison au butternut bleu de Hongrie.
« Je me refuse à gaver »
« Je suis en raisonné, sous les standards en densité d’élevage. Je me refuse à gaver. Là où certains mettent un an et demi pour avoir une truite de 3 kg, je mets près de trois ans. Quant au fumage, pour 120 filets (60 poissons), ce sont 30 heures de travail au total. Ce, cinq fois par semaine. Tout cela c’est du temps, cela a un coût… mais c’est le prix de la qualité et du goût », détaille Adrien Millet.
La récompense suprême ?
« C’est le sourire du client, ce contact avec la vente directe », répond-il. Son adage auprès des clients est aussi limpide que l’eau de la Dive : « Si je vous vends de la merde, je ne vous la vendrais qu’une fois. Je ne ferais pas à manger aux gens ce que je ne pourrais pas manger moi-même ».
Gamin, il rêvait du grand large…
Son doux entêtement de ventrachoux truffé de bonhomie sonne comme celui d’un enfant qui a réalisé son rêve, sûr de son destin. Fils de marin-pêcheur aux Sables d’Olonne, gamin, il rêvait du grand large et de ses poissons. Interdit à bord par un paternel qui se refusait à transmettre l’envie d’un métier si difficile, Adrien Millet s’est émancipé en BEP puis en Bac de production aquacole à Guérande, avant d’empocher ses premiers salaires chez un gros pisciculteur angoumoisin. Et c’est ainsi qu’à 32 ans, la Dive est devenue son océan.
On trouve les truites et leurs produits tranformés de l’ERL Pisciculture de Cerzay aux Plaisirs fermiers de Bressuire et Niort (Mendès-France et Sainte-Pezenne). En vente également à "Lépicerie" d’Airvault et au drive fermier de la Grimaudière (Vienne).Adrien Millet vendra ses produits au marché de Noël de Saint-Loup-Lamairé, les samedi 4 et dimanche 5 décembre 2021.En vente directe sur le site de l’exploitation : au moulin de Cerzay (12, rue du Moulin à Assais-les-Jumeaux), du lundi au vendredi (8h-12h ; 14h-17h) ; le samedi (8h-10h) ou sur rendez-vous. Courriel : truite.cerzay gmail.comTél. 06.25.98.44.61.