C’est l’une des pionnières françaises de l’école dehors. Conseillère pédagogique départementale en arts plastiques en Deux-Sèvres, Crystèle Ferjou défend cette pédagogique alternative qui s’appuie sur les ressources de notre environnement.
À l’approche du déconfinement et du retour en classe des élèves, elle est l’une des signataires de deux tribunes dans la presse : dans Le Monde, mardi 29 avril, et dans Mediapart, vendredi 1er mai. Aux côtés d’élus, de membres de la communauté éducative et de représentants d’associations, elle souhaite faire connaître davantage l’école dehors.
Pourquoi avoir signé ces deux tribunes ?
Crystèle Ferjou : "Je suis l’une des premières praticiennes en France de l’école dehors. C’est un peu naturellement que les initiateurs des deux tribunes (N.D.L.R. : Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne, co-auteurs du livre L’Enfant dans la nature, pour Le Monde ; Stéphane Trifiletti, conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, pour Mediapart) ont pris contact avec moi pour que je puisse les cosigner."
L’école dehors a-t-elle davantage de sens après cette période de confinement ?
"De nombreux enfants sont confinés en appartement, sont sollicités pour continuer l’école à la maison, de manière virtuelle, et n’ont pas accès à l’extérieur. Avec le confinement, beaucoup de personnes ont pris conscience de l’importance du bien-être de la nature. Et à l’approche de la réouverture des écoles, on se dit que c’est l’occasion peut-être de renouer avec le monde réel, de requestionner les apprentissages et de pratiquer l’école dehors."
C’est l’occasion de faire connaître une pédagogie plutôt méconnue…
"Cela reste une pédagogie innovante, mais encore peu connue en France. En même temps, nous avons un recul de plus de 60 ans, car les premières classes dehors se sont développées dans les pays nord-européens dans les années 50. Le Danemark est d’ailleurs l’un des premiers pays européens à avoir rouvert ses écoles avec de nombreux établissements préconisant la classe en extérieur par rapport au protocole sanitaire demandé."
Justement, comment cela pourrait s’organiser en tenant compte des contraintes sanitaires ?
"Faire classe dehors libère certaines de ces contraintes. La distanciation sociale est facilitée à l’extérieur, car il y a plus d’espace et cela permet aux enfants d’être moins en contact des uns des autres. Faire classe dehors, c’est aussi s’appuyer sur un support pédagogique que sont des éléments naturels, la flore, la faune… D’autant que la nature est en perpétuels mouvements et renouvellements. C’est donc plus facile de susciter la curiosité et la motivation de l’enfant car il y a toujours quelque chose à observer, plus que dans une salle de classe."
Un exemple ?
"Une collection de bâtons, qui aura servi à faire des mesures, un tri ou un classement par des élèves, on peut les réutiliser à chaque fois. Puisqu’en milieu naturel, nous avons un support pédagogique qui se renouvelle en permanence, notamment en période de printemps."
Pensez-vous que des établissements scolaires sont prêts à franchir le pas, notamment en Deux-Sèvres ?
"En Deux-Sèvres, une cinquantaine de classes ont recours à l’école dehors, principalement en Gâtine, dans le Mellois et le Bocage bressuirais. Les collègues qui le pratiquaient déjà avant le confinement se projettent pour une ouverture de leur école et un accueil de leurs élèves, avec un temps de classe à l’extérieur. D’autres enseignants souhaitaient franchir le pas après les vacances de Pâques. Avec le déconfinement et la réouverture des écoles, ils prennent conscience qu’il y a des possibilités d’essayer des premières choses."